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DOCU : UNLIKE U

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U COMME UNDERGROUND

J’avais envie de voir le documentaire de Henrik Regel et Björn Birg “Unlike U” , dont le jeu de mots du titre est bien trouvé, avec ce “U”, qui vient de U-Bahn, le métro berlinois.

Extrait d’un article précédemment publié sur Art de Berlin, le 1er aout 2012

 

Pas de voix off pour guider le spectateur, à peine le pseudo de chaque artiste, pendant quelques secondes, au moment où il prend la parole. Pour qui ne connait absolument pas la scène “graff” allemande, et Berlinoise en particulier, c’est une véritable découverte.

Les images se succèdent nous montrant une série de pièces réalisées par les Writers et plus particulièrement les Train writers.

C’est que dans le monde du Graffiti ou du plus général Street Art, il y a de nombreuses formes d’art, de nombreuses tendances.

Ainsi, afin de remettre une œuvre dans son contexte, il est nécessaire d’analyser non seulement les techniques employées (pochoir, dessin aux sprays, collage, mosaïque), les supports sur lesquels les œuvres sont déclinées (mobilier urbain, murs, trains,…) et les thèmes ou sujet (personnages, lettrage, message politique,..) …

Prenons un artiste tel que Banksy, par exemple, puisqu’il est celui dont les œuvres sont les plus renommées. Il est surtout connu pour ses pochoirs (technique) sur murs (support) aux messages anti-capitalistes, politiques,… (thèmes). Ce qui ne l’a pas empêché de réaliser d’autres œuvres et performances, bien entendu…

Ceux dont nous parle le documentaire Unlike U sont des Writers. Ils réalisent des Writings, à mains libres avec leurs bombes de peinture (technique) sur trains (support) représentant des lettrages (colorés, parfois compliqués) de leur nom ou de celui de leur crew (thèmes).

A ne pas confondre avec le simple Tag qui est la signature du taggeur réalisé en général en une seule couleur, d’un seul trait, rapide sur mur ou sur sticker collé sur mobiliers urbains, le plus souvent. Le thème des train writers est le même (la signature) mais les méthodes, les couleurs utilisées et surtout le support de leur œuvre rend leur travail bien plus périlleux, plus imposant et plus spectaculaire que le simple tag.

Le documentaire nous fait découvrir la passion qui anime les Train writers, ce qui les motive, leur fait prendre des risques, les montées d’adrénaline sur le terrain, les risques encourus : plus ou moins importants selon les époques.

Nous y apprenons qu’au temps béni qui a suivi la chute du mur, ils pouvaient peindre un wagon au vu et au su de tous, sur le quai de la station de U-Bahn…. En nous expliquant qu’à l’époque les gens avaient des préoccupations plus graves que quelques mecs colorant les trains…

Puis les circonstances ont évolué : au fur et à mesure que la situation du pays se stabilise, les risques légaux pris par les Train writers deviennent plus importants : la BVG commence à s’intéresser à eux, à les poursuivre avec l’aide des forces de l’ordre et une patrouille spéciale de la police (GIB – Graffiti in Berlin) est même créée à l’époque.

Au détour des témoignages, nous comprenons les sentiments un peu ambigus qu’ont les Writers vis-à-vis de ces policiers : entre crainte, indifférence ou compréhension (le looks des Train Writers fait songer aux terroristes) et respect face à la connaissance qu’acquiert la GIB de leur travail ainsi que l’intérêt qu’ils portent aux œuvres réalisées… même si l’objectif de cet intérêt est de permettre de mettre la main sur les auteurs. Les policiers sont vite devenus leur premier public…. Et parfois, comme le souligne le policier interrogé : leur thème de prédilection quand les Writers ont le temps d’ajouter des personnages… !

Tout au long du documentaire nous découvrons les différentes personnalités, certaines figures marquantes de Berlin, qui ont fréquenté le “Friedriechstrasse Bench”, les problèmes auxquelles les Writers doivent faire face afin de tenter d’allier leur vie de tous les jours avec celle de la nuit… puisque leurs horaires dépendent de ceux de la BVG… !!

Dès les premières images, le spectateur est emmené à la suite des Writers : on y pénètre des lieux interdits au public, en passant on bouge une caméra de surveillance afin de la tourner vers le mur plutôt que vers le passage qui mène aux trains…

L’intérêt principal de ce documentaire en particulier tient à ces images incroyables et qui nous font comprendre les ennuis auxquels doivent faire face l’équipe de tournage, similaires à ceux des protagonistes du film !

Les auteurs n’élucident pas les questions concernant la perte de repères dans la vie de certains Writers… L’enfermement dans un système où ils finissent par ne fréquenter que ceux (uniquement des hommes) qui ont la même passion… ou plutôt le même délire : avoir son nom qui tourne à travers la ville est l’une des choses les plus importantes à leurs yeux. Au prix d’une vie familiale, affective et sociale. Au prix de sa propre vie également, quand l’on songe à l’un d’entre eux, Ruzd, qui s’est donné la mort en se jetant sous un train…

Le spectateur peut très vite être pris d’un sentiment de malaise, d’incompréhension… voire se moquer un peu de ces artistes qui mettent tant d’énergie pour peindre leur nom sur des trains ou des tunnels… Ce serait oublier un peu rapidement à quel point ce sont ces Street artistes qui, s’inspirant du New York vu dans les films, ont donné au monde une image de Berlin, à partir de la fin des années ’80, semblable à celle de la Grande Pomme des années 70…

En décorant nuit après nuit wagons, stations et tunnels, ils ont donné aux Berlinois les couleurs et le cadre de leurs activités artistiques, sociales et politiques qui attirent vers la ville tous ces fous des temps modernes.

Au final, un documentaire incontournable, rare et pendant un temps interdit de diffusion en Allemagne, mais qu’il est nécessaire de visionner afin de comprendre la couche la plus underground de la scène Street Art de Berlin, loin des “stars” respectées du grand public dont les œuvres sur certains murs de la ville sont admirées des touristes du monde entier.

Yelyam

Photo de couverture prise sur les quais de la gare Bruxelles-Chapelle, spot de graffiti de la capitale. A noter que la Belgique est considérée aujourd’hui comme un “eldorado” pour les train writers… !

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